Faites connaissance avec trois femmes athlètes d’exception qui ont mis leur vaste expérience et leur bagage au service de la relève sportive.
Danièle Sauvageau: anciennement entraîneure et mentore au hockey féminin, maintenant DG pour la LPHF
Danièle Sauvageau a grandi à Deux-Montagnes. Été comme hiver, le parc de son quartier était son terrain de jeu. Alors qu’il lui paraissait normal de jouer au hockey dehors avec ses deux frères, elle a «frappé un mur», comme on dit, lorsqu’elle a voulu s’inscrire dans une ligue organisée. Impossible pour une fille ! Bien décidée à conserver un lien avec le sport, elle s’est débrouillée pour «aider» à sa manière. Pendant de nombreuses années, elle a rempli des bouteilles d’eau et ouvert la porte durant les pratiques de ses frères. Elle en a profité pour observer, comprendre le jeu et donner des conseils aux joueurs sur le banc. Cette implication a forgé son désir de s’investir dans le hockey.
«Ce qui a guidé mes choix tout au long de mon parcours dans le milieu sportif, c’est d’offrir à d’autres filles ce que je n’ai pas pu obtenir lorsque j’étais jeune.»
- Danièle Sauvageau
On se souvient de Danièle Sauvageau comme l’entraîneure-chef qui, en 2002, a mené l’équipe canadienne de hockey féminin à sa première médaille olympique de l’histoire. Mais depuis 35 ans, Danièle a touché à tous les niveaux du monde du hockey féminin. Elle a surtout contribué à intégrer les filles dans les arénas. D’abord en mettant sur pied des équipes féminines, puis en participant à six jeux olympiques en tant qu’entraîneure, directrice générale et conseillère en coaching. Elle a contribué aux victoires de l’équipe de hockey féminin en autant de championnats du monde. «Ce qui a guidé mes choix tout au long de mon parcours dans le milieu sportif, c’est d’offrir à d’autres filles ce que je n’ai pas pu obtenir lorsque j’étais jeune», admet Danièle.
Une femme coach dans un monde d’hommes
Première femme entraîneure adjointe dans la ligue de hockey junior majeur du Québec, elle s’est peu à peu taillé la place qu’on lui a laissée. Peu importe le niveau de jeu, elle souligne qu’un bon entraîneur, qu’il soit homme ou femme, doit d’abord savoir écouter. «Son rôle est d’observer, puis de donner des conseils au moment opportun, avec les mots justes et le ton approprié. Tout le talent d’un coach est dans sa façon d’intervenir», affirme-t-elle.
Au-delà des genres, chaque personne apprend différemment, mais d’un point de vue physiologique, le cerveau des hommes évolue jusqu’à 23 ans, alors que celui des femmes atteint sa maturité plus tôt. «En tant qu’entraîneure, c’est important d’avoir cette sensibilité et de la considérer dans son approche», croit-elle. Par exemple, elle remarque que les femmes veulent souvent comprendre le pourquoi des choses. Elles ont besoin de plus d’explications avant de passer à l’action. Une fois qu’elles ont bien intégré une notion, elles sont plus rapides pour l’appliquer sur la glace.
En parallèle de sa vie sportive, Danièle Sauvageau a travaillé pendant 33 ans au service de Police de la Ville de Montréal et à la GRC. Durant son parcours, elle a croisé Lison Ostiguy, une femme policière haut gradée qui avait un bon leadership. «Je ne la connaissais pas personnellement, raconte Danièle, mais j’ai observé son professionnalisme. J’admirais sa façon de demeurer elle-même malgré sa position d’autorité. Elle m’a servi d’inspiration dans mon métier autant que dans ma carrière d’entraîneure.»
Auparavant conseillère et conférencière en coaching exécutif et sportif, Danièle Sauvageau mettait à profit ses études en travail social et en gestion, ainsi que son vaste bagage pour guider les entraîneur·e·s de haute performance et même des dirigeant·e·s d’entreprises. En 2021, elle a accompagné la préparation olympique dans 14 sports confondus, dont le water-polo, le patinage de vitesse et la nage synchronisée. Ses conseils sont orientés vers le «savoir-être», c’est-à-dire comment se comporter avec les athlètes et créer des environnements sécuritaires, propices au développement.
Danièle Sauvageau a également contribué à mettre sur pied le programme de hockey féminin de l’Université de Montréal et a créé le Centre 21.02, un centre de haute performance voué au hockey féminin.
Selon elle, la prochaine étape pour inciter la participation des filles, c’est d’accorder plus de place aux sports féminins dans les médias. Mais c’est un autre débat…
Danièle Sauvageau évolue maintenant comme DG au sein de l’équipe montréalaise de la Ligue professionnelle de hockey féminin (LPHF). D'ailleurs, elle se réjouit d'enfin occuper un poste à temps plein avec une équipe pour la toute première fois de sa carrière!
Sylvie Béliveau: ouvrir la voie pour les femmes en sport
Pionnière du soccer féminin, Sylvie Béliveau fait partie de la première équipe de femmes championnes canadiennes de soccer en 1978 et 1981. Hélas, pour ces joueuses, il n’y avait pas moyen, à l’époque, de progresser à un niveau supérieur. «C’est à ce moment que j’ai décidé de travailler pour que les prochaines générations de filles puissent accéder à des coupes du monde ou des Jeux olympiques en soccer», raconte Sylvie. Et aujourd’hui, «on y est!» dit-elle fièrement.
«Tout au long de mon parcours, j’ai reçu des appuis, souligne-t-elle. Le seul fait qu’une femme soit présente sur les tables de discussion par exemple au sein de l’Association canadienne de soccer a contribué à faire changer les mentalités.»
- Sylvie Béliveau
Depuis plus de 30 ans, Sylvie Béliveau a frayé son chemin dans le milieu du sport en franchissant les barrières une à une. D’abord joueuse, elle a entraîné divers clubs de soccer à Sherbrooke, les équipes féminines des universités McGill et Victoria, puis au niveau provincial au Québec et en Alberta, et même au sein de l’équipe nationale séniore. «Tout au long de mon parcours, j’ai reçu des appuis, souligne-t-elle. Le seul fait qu’une femme soit présente sur les tables de discussion par exemple au sein de l’Association canadienne de soccer a contribué à faire changer les mentalités.» Impliquée dans trois jeux olympiques de 1999 à 2016, en plus des coupes du monde de soccer, Sylvie a pu constater l’évolution énorme que le sport a connue sur le plan du développement des athlètes et des programmes d’entraînement.
Le coaching au féminin en constante progression
Quand Sylvie Béliveau a débuté comme entraîneure, les standards et les stratégies de jeu qui existaient en soccer concernaient seulement les hommes. Lorsqu’elle est a été nommée instructrice pour la Fédération internationale de football association (FIFA), son rôle au sein du groupe technique a été d’analyser et de documenter le sport au féminin pour établir les tendances de jeu.
Le soccer, comme la majorité des sports, a beaucoup évolué et les entraînements comportent autant de notions physiques, que d’aspects cognitifs et psychologiques.
«Alors raison de plus pour que les femmes en fassent partie ! affirme Sylvie. Une femme peut apporter un bagage très pertinent dans une équipe d’hommes, et vice versa.»
Aujourd’hui, on rencontre des femmes qui ont commencé à jouer très jeunes, dans de nombreux sports. Elles ont bien souvent autant d’expérience que les hommes et elles peuvent y apporter leur bagage pour encadrer le sport amateur autant qu’au niveau professionnel. Sylvie Béliveau constate aussi qu’un plus grand nombre de femmes aspire à occuper des postes d’arbitres, d’entraîneures ou de dirigeantes d’équipe et elles peuvent gagnent leur vie dans ce domaine. «C’est merveilleux», s’exclame-t-elle. «Je pense que le sport bénéficie de l’expertise et de la vision d’équipes d’entraîneurs mixtes. Les hommes qui dirigent des équipes féminines peuvent envisager une progression intéressante au niveau national ou international. Et les athlètes s’enrichissent d’idées qui se complètent.»
Fondatrice d’Égale Action, il y a 20 ans, Sylvie a toujours travaillé pour améliorer les conditions des filles et des femmes dans le domaine du sport et de la société dans son ensemble. «Un jeune homme qui évolue dans le sport alors que son entraîneure est une femme, trouvera normal plus tard d’avoir une femme comme patronne, cite-t-elle comme exemple. Je pense qu’en encourageant le leadership féminin dans le monde du sport, on va changer la culture et générer le respect de manière beaucoup plus large.»
Ariane Loignon: le facteur humain avant tout!
Athlète de haut niveau en patinage de vitesse longue piste, Ariane Loignon a participé aux Jeux de Calgary en 1988 et à plusieurs championnats du monde de 1984 à 1990. Au cours de sa carrière d’athlète, tous les étés, elle s’est impliquée comme entraîneure invitée dans plusieurs clubs au Canada.
Après sa retraite comme patineuse, elle étudie en sciences politiques dans l’optique de développer le sport au Québec. Puis, elle choisit de consacrer du temps à sa famille, tout en restant engagée dans le monde du sport. C’est au club de patinage de vitesse sur courte piste de Saint-Romuald qu’elle fait ses premières armes comme entraîneure en 1991. «Cela me donnait une excellente occasion de sortir de chez moi alors que j’ai été plusieurs années maman à la maison», se rappelle Ariane.
Ce qui l’a toujours animée comme entraîneure, c’est sa passion de l’humain. Pour Ariane Loignon, être coache c’est avant tout tisser des liens forts avec les athlètes. «À chaque entraînement, je me souciais de parler à chacun des patineurs de mon groupe. Parfois, c’était un conseil technique, mais d’autres fois, le simple fait de demander un service au jeune me permettait d’établir un contact avec lui. Par la suite, c’était plus facile pour chacun de ses athlètes de l’approcher s’ils avaient des questions ou simplement pour jaser.»
«En connaissant mieux mes athlètes, je crois que j’ai développé une bonne sensibilité pour lire leurs émotions et mieux les conseiller pour améliorer leurs performances dans les bons coups comme les moments plus difficiles.»
- Ariane Loignon
Dénicher de jeunes talents
Tout au long de ses vingt années de coaching aux Clubs de Saint-Romuald et de Lévis, de même qu’au Centre régional à Québec, Ariane cherche avant tout à donner confiance aux jeunes. «En connaissant mieux mes athlètes, je crois que j’ai développé une bonne sensibilité pour lire leurs émotions et mieux les conseiller pour améliorer leurs performances dans les bons coups comme les moments plus difficiles.»
Ariane Loignon a aussi un talent pour voir le potentiel dans de jeunes sportifs. «Selon moi, ce n’est pas important qu’un patineur soit bon dès ses débuts. C’est surtout sa motivation qui compte. Pousser trop les athlètes peut parfois s’avérer inutile», croit-elle. «Je pense qu’il est important de respecter la volonté des sportifs et les amener à réaliser eux-mêmes leurs véritables forces.» Elle a fièrement accompagné plusieurs athlètes à un niveau international, dont Kalyna Roberge, Vincent Labrie et Dominique Gravel, qui ont tous trois fait partie de l’équipe canadienne sur longue ou courte piste.
«Un bon entraîneur n’a pas nécessairement toutes les habiletés techniques, dit Ariane. Il faut savoir reconnaître ses limites et bien s’entourer. D’autant plus qu’on a maintenant accès à des spécialistes en kinésiologie, en nutrition et en psychologie pour accompagner les athlètes, ainsi que de nombreuses ressources au niveau de l’équipement.»
Ariane n’est jamais restée très loin du domaine sportif. Aujourd’hui, elle est conseillère en sport à la ville de Lévis et a été membre du conseil d’administration de l’Institut national du sport du Québec pendant 8 ans. Son bagage d’athlète et d’entraîneure lui permet d’être à l’écoute des gens et à construire sur du positif. Elle applaudit la mouvance actuelle et travaille à rééquilibrer la présence des femmes sur les postes administratifs en sport.
Pour Ariane, le patinage de vitesse, c’est aussi une histoire de famille! Son conjoint Robert Dubreuil, également olympien, est directeur général de la Fédération de patinage de vitesse du Québec et son fils Laurent Dubreuil a été couronné champion du monde sur longue piste au 500 mètres en 2021. Elle se réjouit de pouvoir continuer à côtoyer ce sport de près.